DYNAMIQUE NARRATIVE

 

  Un épisode d'Uchronia se construit sous la forme d'une succession de scènes, au cours desquelles l'intrigue progresse jusqu'à son dénouement. Chaque scène doit s'inscrire dans la logique narrative du jeu : certaines d'entre elles privilégieront l'action pure, d'autres mettront davantage l'accent sur le dialogue et les interactions entre personnages, d'autres encore auront pour raison d'être la révélation d'informations décisives ou tout simplement la mise en place d'une atmosphère particulière.

 

  Un épisode doit présenter les temps forts et les moments-clés de l'histoire telle qu'elle est vécue par ses héros et non la totalité des événements survenant entre son commencement et son dénouement. Il est, par exemple, totalement inutile (et tout à fait ennuyeux) de s'attarder sur les temps morts de l'intrigue, sous peine de voir celle-ci s'enliser dans une suite de détails fastidieux : si rien d'intéressant n'est censé se passer pendant un certain laps de temps, le Chroniqueur ne devra pas hésiter à utiliser une ellipse temporelle pour passer d'une Scène à une autre ("Après une bonne nuit de sommeil…", "Une semaine plus tard…" et autres "Votre voyage en train dure environ trois jours…"). Il est toutefois important de ne pas confondre dynamique narrative et précipitation en sautant sans cesse d'une scène à une autre. Le sentiment de continuité constitue un des ingrédients les plus importants d'un scénario réussi : pour renforcer ce sentiment chez les joueurs, le Chroniqueur devra savoir ménager quelques scènes de transition entre les moments forts de son scénario. Ainsi, un voyage en train peut être résumé en une seule phrase ou, au contraire, servir d'arrière-plan à une longue conversation entre les héros, surtout si la conversation en question permet aux joueurs de faire avancer l'intrigue ou de mettre en avant le caractère de leurs personnages respectifs.

 

  Un bon épisode ne correspond pas seulement à une suite chronologique de scènes liées les unes aux autres par un fil conducteur : il doit également gagner en intensité dramatique au fil de son déroulement. Dans la plupart des romans, des films et des feuilletons susceptibles de servir de sources d'inspiration à un jeu de mystère et d'aventure, la dynamique dramatique est des plus simples et se décompose en trois phases : exposition, développement et résolution.

 

  La phase d'exposition ne dure généralement qu'une ou deux scènes. Comme son nom l'indique, elle consiste à exposer la situation que les héros vont devoir résoudre, explorer ou affronter : dans beaucoup de jeux de rôle, la scène d'exposition classique prend généralement la forme d'une rencontre entre les héros et un protagoniste qui souhaite leur confier une mission, demander leur assistance dans quelque affaire délicate ou encore leur soumettre un problème hors du commun - en bref, les mettre sur les rails de l'histoire. Bien sûr, il est tout à fait possible d'imaginer des scènes d'exposition un peu plus subtiles, jouant davantage sur les motivations personnelles des héros - ou même de ne pas utiliser de scène d'exposition du tout, en jetant directement les héros (et les joueurs) au cœur de l'action (technique connue sous le nom d'in medias res ou d'immediate stress, ce qui revient à peu près au même). Dans un autre ordre d'idée, rien n'empêche un Chroniqueur de faire précéder sa scène d'exposition d'un bref prologue destiné à mettre les joueurs dans l'ambiance, en reprenant le procédé du pré-générique utilisé dans de nombreuses séries télévisées.

 

  Une fois exposée, l'action suit généralement un mouvement de crescendo, avec, ça et là, quelques accalmies, jusqu'à son climax, c'est à dire jusqu'à la grande scène constituant le point culminant de cette progression dramatique - résolution de l'énigme, évasion spectaculaire, confrontation finale avec le grand méchant de service et autres morceaux de bravoure. Tout l'art de la narration consiste précisément à savoir ménager le suspense jusqu'à ce moment crucial. Pour cela, le Chroniqueur ne devra pas hésiter à recourir à l'usage d'Effets Dramatiques pour compliquer la tâche des héros ou, de manière plus impromptue, pour relancer l'action si celle-ci menace de s'enliser dans des tergiversations sans fin. Là encore, il est préférable de ne pas sombrer dans un usage systématique de ce genre de procédés, sous peine de rendre un peu trop visibles (et prévisibles !) les rouages dramatiques de votre scénario : par définition, un coup de théâtre auquel tout le monde s'attend n'est plus un coup de théâtre. Enfin, il est important de garder à l'esprit que les joueurs incarnent les héros de l'histoire et que c'est principalement à travers leurs décisions et leurs initiatives que l'action doit prendre forme. Un bon Chroniqueur doit savoir adapter le déroulement de son scénario aux idées de ses joueurs, aussi inattendues soient-elles… ou, au contraire, savoir amener ses joueurs où il le souhaite sans leur en donner l'impression !

 

  Quant à la phase de résolution, son contenu et son rythme découlent directement des décisions des joueurs et des actions de leurs personnages - à moins que le Chroniqueur ne se sente obligé d'utiliser un deus ex machina (voir ci-dessous). Dans la logique d'une action développée en crescendo jusqu'à son paroxysme, l'histoire peut se poursuivre decrescendo durant quelques scènes jusqu'à son dénouement ou, au contraire, s'achever sur une grande scène finale, dramatique et spectaculaire. Dans ce cas, il est vivement conseillé de conclure l'épisode par un épilogue se déroulant "quelque temps plus tard…" et permettant aux héros de faire le point sur les événements qu'ils viennent de traverser.

 

Intrigue et Trame Effets Dramatiques
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